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23 juillet 2024

Lecture : Journal d'un prof à la gomme, par Fred Leclerc

Merci à MamzelleCarnetO pour son bon plan lecture 😘 qui m'a permis de découvrir plusieurs titres récents ou à paraître, dont cette bande-dessinée dont la note de lecture a toute sa place ici.


édition La Boîte à Bulles, août 2024 

Il s'agit d'une BD autobiographique de Fred Leclerc, qui tourne la page de 25 années de carrière dans la pub. Il se tourne vers l'enseignement, par idéalisme, suite au choc de l'assassinat de Samuel Paty,

Le titre et la couverture annoncent assez clairement les tribulations de l'auteur dans le milieu scolaire et le parcours initiatique ubuesque d'un tout frais PVP (Professeur de la Ville de Paris), spécialité arts plastiques, en primaire. 

Rien n'est épargné au héros dans cet univers hostile : les emplois du temps impossibles, le jargon EducNat et ses mille acronymes, la formation qui "vous apprend à nager pendant que vous vous noyez",  les élèves en situation de handicap (sans formation pour lui) et ceux dans une situation sociale ou familiale impossible. Les jours s’égrènent et les illusions de Fred-Don Quichotte tombent. Sur sa route, Fred doit composer avec ses co-stagiaires, sa directrice dont les yeux lancent des éclairs, sa tutrice expérimentée et bienveillante, ainsi que ses formateurs plus ou moins pertinents. Au fil des pages, Fred oscille entre découragement, motivation, questionnements, rire jaune et lueurs d'espoir.
Du point de vue graphique, une palette de peinture enfantine se vide au fil des chapitres (allégorie de l'énergie de l'apprenti-prof ?). J'ai trouvé original et chouette le choix d'une seule couleur pour toutes les planches d'un même chapitre, en plus du noir et blanc.

Moi-même enseignante en collège-lycée depuis 19 ans, cette BD m'a touchée par son humanité et l'humilité des remises en question d'un débutant. Je me suis souvent surprise à penser "C'est tellement ça, l'école aujourd'hui" et j'ai compati, même si mon parcours est très différent de celui de Fred. 

Enfin, c'est une BD pleine d'humour noir qui fait sourire à de nombreuses reprises. J'avais hâte de découvrir si Fred avait "trouvé sa place" en tant qu'enseignant.

Merci à #LaBoiteaBulles pour cette lecture du #Journaldunprofàlagomme via #NetGalleyFrance. Cette note de lecture n'engage que moi.

Les images sont issues de la BD et disponibles sur le site de l'éditeur dans une interview

8 mars 2024

Sciences au féminin (v7) : ressources, gestes professionnels et projets

Dernière mise à jour de l'article et des PDF en bas de l'article : 17 mars 2024
 

Dans les thématiques professionnelles qui me tiennent à cœur, il y a "les filles et les maths". Je trouve que nos élèves filles énoncent très jeunes qu'il y a des barrières entre elles et les maths. Cette idée ne vient pas de nulle part, elle s'insinue sournoisement dans leurs têtes, au travers de leur vécu à l'école (le discours des PE conscient ou inconscient) et souvent à la maison. Combien de mères ai-je entendu prononcer en rendez-vous, souvent devant leur enfant : "On est nulles en maths de mère en fille, dans la famille... Les maths, c'est pour son père" ?

Le phénomène est généralisable aux sciences dites "dures" comme la physique ou l'informatique.

S'informer et se former sur les stéréotypes de genre liés aux sciences quand on est parent, prof, PE ou perdir :

Des colloques Femmes et Sciences :

J'ai suivi ces trois interventions et les ai trouvées passionnantes ! Ce type de conférence dresse généralement un état des lieux historique et sociologique (quelle place pour la femme dans la société et dans la classe ?), décrit les stéréotypes de genre/de sexe, analyse les pratiques des enseignants (appréciations, prise de parole, conseils d'orientation), et scrute les stéréotypes dans les jouets ou les manuels scolaires.

J'ai participé aussi à l'atelier sur ce thème lors du Salon des mathématiques 2021 en ligne et j'ai été surprise et déçue qu'il y ait seulement une poignée d'enseignants inscrits ; c'est un thème qui mobilise peu chez les profs... Je m'en étais également rendue compte en mars 2021, lorsque j'ai été invitée par nos IPR à être jurée des entretiens professionnels des lauréats de concours 2020. Mme Catherine Huet, IA-IPR de Versailles, qui était en binôme avec moi, m'a encouragée à aborder ce thème en fin d'entretien avec les collègues-stagiaires, au sein de la grande thématique "valeurs de la République / égalité à l'école". Je me suis dit qu'il faudrait que tous les enseignants aient au moins un module de sensibilisation à ce thème de l'orientation des filles vers les sciences, et la lutte contre les stéréotypes dans ce domaine... et pas seulement les quelques enseignantEs qui s'y intéressent déjà, et pas seulement les profs de lycée car c'est bien tard pour rattraper les choses... 

Pour les parents, il y a un livret conçu par Femmes et mathématiques avec Animath.

Pour les profs et les parents, il y a d'excellents podcasts, notamment : Sophie Germain Project, par la journaliste et autrice Sylvie Dodeller, et La boss des maths par Texas Instruments, avec des invitées très intéressantes dans les deux cas.

 Voilà pour la théorie.

Concrètement quelles actions dans mes classes et mon établissement ?

  • Je suis particulièrement vigilante à la prise de parole et au passage au tableau :
Je tiens les comptes mentalement dans les prises de parole, pour qu'on s'approche de la parité filles-garçons. Je m'astreins à ne pas donner tout de suite la parole aux élèves les plus prompts à lever la main, sinon ce sont les garçons qui l'emportent, statistiquement : je "patiente" pour que davantage de mains se lèvent, notamment chez les filles. Je fais baisser les mains quand j'ai donné la parole à quelqu'un (garçon ou fille) pour baisser le niveau de pression du groupe et rassurer celui ou celle qui va parler. J'essaye de ne pas suivre le cliché "les questions de cours pour les filles, les questions créatives pour les garçons". J'utilise beaucoup l'ardoise, qui "oblige" tout le monde à répondre, fille ou garçon.
  • Je fais attention aux appréciations dans les bulletins
Généralement, on trouve les filles "sérieuses" et on demande aux garçons d'exploiter "leur potentiel". J'essaye d'expliciter de plus en plus que l'élève fille aussi, a un bon potentiel scientifique ou des qualités utiles en sciences.
  • Falsification du stéréotype de genre en évaluation
Juste avant la passation de la Course aux Nombres, j'annonce aux élèves "Les filles et les garçons réussissent aussi bien les uns que les autres ce type d'épreuve". Je prononce cette phrase indépendamment de toute observation statistique des résultats de mes classes à la Course aux Nombres. Le simple fait de le dire va améliorer la confiance des filles et les faire mieux performer. J'avais retenu de diverses conférences que cela ne nuit pas aux garçons, mais Viviane Pons me fait douter en partageant des nouvelles recherches)
  • Des Sacamaths pour faire connaître des femmes de sciences (depuis 2020)
Dans mes classes de 6è, des sacs circulent avec des livres et des jeux. Les loisirs sont un support idéal pour présenter des modèles féminins totalement inconnus des élèves : Sophie Germain, Émilie du Châtelet, Ada Lovelace ou Katherine Johnson par exemple. Certains livres présentent l'effet Matilda, c'est-à-dire la spoliation d'une découverte d'une femme de science par son mentor. 
Ces projets menés en 4è développent la culture scientifique générale de tous les élèves, garçons et filles. Mais j'ai composé la sélection des albums en Anglais et des Bandes Dessinées avec une grosse arrière-pensée : il y a des livres permettant de découvrir Maryam Mirzakhani, Hypatie, Florence Nightingale, Emmy Noether ou Sophie Kowalevski => Les retours des élèves filles sont très clairs : elles sont admiratives de ces  femmes scientifiques, elles sont curieuses d'en savoir plus, elles aiment voir des femmes qui se battent pour leurs idées, qui se rebellent, qui s'enthousiasment pour une science. L'adolescence est donc un très bon moment pour sensibiliser nos jeunes, et pas seulement les filles ! 
 
NB : Sur les projets Sacamaths, Bibliomaths en Anglais et Sciences en bulles, il y a un bémol : c'est "l'effet Marie Curie". Si on ne présente que des femmes scientifiques exceptionnelles, on risque d'être contre-productif en laissant croire qu'il n'est pas possible d'être un femme normale ET une scientifique. D'où l'importance de sélectionner aussi des ouvrages présentant des femmes actives ou des doctorantes contemporaines avec lesquelles une identification des jeunes filles est possible. C'est le cas par exemple des scientifiques de la BD les Décodeuses du numérique, des chercheuses de La cerise dans le labo, des thésardes des opus Sciences en bulles (publiés à chaque Fête de la science) ou de Ma thèse en deux planches. Ces ouvrages mettent aussi beaucoup en avant le domaine scientifique, et pas seulement la personne et son parcours de vie.
 
  • Animation d'une rubrique "EfferveSciences" sur l'ENT du lycée (depuis 2022)
 C'est l'occasion de proposer de l'actu générale (podcasts, conférences, expos, films, remises de prix scientifiques, etc.) et de proposer les inscriptions à des événements non-mixtes comme "Filles et maths / info : une équation lumineuse", ou encore les RJMI Rendez-vous des Jeunes Mathématiciennes et Informaticiennes et les Speeds-meetings métiers de Femmes&Maths et Animath. Ce sont des formidables leviers pour désarmer les stéréotypes chez les filles elles-mêmes : conférences scientifiques, ateliers sur les stéréotypes, pièce de théâtre dont on modifie la fin, rencontres avec des doctorantes ou des chercheuses, recherche collective de problèmes ouverts... => Ces programmes recueillent l'adhésion des jeunes filles.
 

  • Une double expo interactive dans nos CDI collège et lycée (2023)
Promouvoir les femmes scientifiques d'hier et d'aujourd'hui ; j'en parle dans cet article.
  • Des temps-forts Elles bougent pour l'orientation (2024)
Tables rondes animés par des ingénieures bénévoles ; j'en parle dans cet article.
  • Exposition temporaire pour renommer les couloirs et les escaliers (2024)
Des élèves volontaires de 4è, 1ère et terminale ont choisi une femme scientifique disparue ou contemporaine. Elles ont mené des recherches sur elle puis réalisé une affiche ; j'ai édité des "plaques" parisiennes pour l'affichage dans nos lieux de circulation (photos à venir). Le second effet Kiss cool, c'est la super réaction de Claire Mathieu qui a été touchée par notre démarche. Elle a proposé une visio aux élèves pour répondre à leurs questions (c'est mardi !).
 

  • Opération coquelicot le 8 mars (2023 et 2024)
À l'invitation de l'association Femmes & Maths, "portons du rouge pour rendre visibles les filles et les femmes de sciences". L'an dernier, je l'ai fait seulement dans mes classes, et cette année, nous l'avons proposé à tout le collège et le lycée :

Quelles ressources (sites, biblio, vidéos, podcasts) pour explorer ce thème ?

Ressources institutionnelles :
Banque de ressources "Sciences au féminin" que j'ai compilées dans trois documents :

Si vous placez la souris dans le coin supérieur droit des PDF, vous avez la possibilité de l'ouvrir dans une nouvelle fenêtre et de le télécharger.

 



6 mars 2024

Very math trip : l'effet waooh !

Dimanche dernier, j'ai eu la chance d'assister à l'excellent one man show one math show Very Math Trip écrit et joué par Manu Houdart et mis en scène par Thomas Le Douarec. Le spectacle se joue tous les dimanches à 19 h au Lucernaire (Paris 6è) , jusqu'à début juin.

NB : Je lis dans la newsletter de la Maison Poincaré cette bonne affaire : 

Offre partenaire : tarif partenaire à 20€ au lieu de 30€ pour toutes les représentations jusqu’au 2 juin 2024, dans la limite des places disponibles.
Réservation ici avec le code promotionnel "POINCARE" à renseigner après avoir sélectionné "web / plein tarif". Si le code promotionnel ne peut être appliqué, cela veut dire que le quota est atteint.


Ce seul en scène d'une heure vingt environ nous accueille en chanson, avec la bande-son des collègues-copains twittos Stéphane et Adrien de la chaîne On fait des maths ?. Ils se sont fait connaître avec des reprises musicales mathématiques et parodiques de plusieurs tubes : "C'est les maths que j'préfère" (c'est la ouate), "La tristitude mathématique", "Math collection" (rock collection). Leur chaîne propose des maths pour la famille, des promenades mathématiques et des shorts en partenariat avec Mathador, le célèbre jeu de calcul mental qui fête ses 25 ans cette année.


Manu Houdart nous emmène alors dans une promenade mathématique, intelligente, dynamique et drôle. Les "traumathisés" se réconcilieront vite avec cette belle discipline et feront chauffer leurs neurones. Je ne dévoilerai pas ici tout le contenu du spectacle, mais vous rencontrerez sur scène un Grec bodybuildé, des fractions à boire, le côté obscur de la force, un superhéros, des tours de magie avec ou sans trucs, des médaillés non olympiques, un bulletin scolaire belge, des performances de mémorisation, une myriade de décimales de Pi... 

Une chose est sûre, vous allez participer et vous Gausser ! Un spectacle familial qui s'appréciera sans doute davantage à partir de la classe de 4è, pour saisir les jeux de mots, les allusions aux programmes etc.

J'ai été particulièrement admirative de la manière dont Manu s'adapte aux réponses fournies par le public aux défis qu'il lance. Il y a toujours des mauvaises réponses qui sortent (celles qui sont intuitives, attendues, mais fausses), mais aussi des réponses proches de la vérité, voire exactes. Dans la salle ce dimanche, deux lycéens avaient même sorti une calculatrice pour répondre à l'un des défis. Manu recueille les réponses avec un enthousiasme égal, fait douter ceux qui ont la vérité, prêche le faux, nous taquine, révèle le vrai et rend avec le sourire les lauriers à ceux qui les ont mérités, sans écraser ceux qui se sont trompés.

J'ai eu la chance d'être présente le soir où Manu Houdart échangeait avec le public à l'issue de la représentation ; merci pour ces échanges instructifs ! Nous avons évoqué entre autres le lien entre l'art du spectacle et l'enseignement, sur la diversité des spectacles au Festival d'Avignon. Nous avons même parlé littérature (Littéramath), fausses anecdotes scientifiques (livre Et la pomme ne tombas pas sur la tête de Newton, d'Antoine Houlou-Garcia).

L'effet Waooh, ce n'est pas seulement un spectacle...

J'avais découvert Manu Houdart à travers les réseaux sociaux, sur X-Twitter notamment et sur sa chaîne YouTube, où il a publié de nombreuses vidéos sur les effets Waooh des maths pendant la période Covid et post-confinement. On y trouve notamment des capsules de miscellanées de culture générale ou de cryptographie, des portraits de mathématiciennes (Emmy Noether, Maria Gaetana Agnesi etc.), des probas et des stats avec un angle pratique (loterie, tirages au sort, tests covid etc.), et plus encore. J'avais bien aimé sa collaboration avec un autre "montreur de mathématiques" : Mickaël Launay et Manu Houdart avaient mesuré la Tour Eiffel de manière expérimentale en restant au sol, et en utilisant le théorème de Thalès.

 
 
Si vous n'êtes pas proche de Paris, vous pouvez aussi vous procurer le livre Very math trip qui reprend quelques éléments du spectacle mais aussi des chapitres inédits. Il a toute sa place dans le CDI d'un lycée ou une bibliothèque familiale.
 

 

Un grand merci Manu pour cette très bonne soirée au Lucernaire !

4 mars 2024

Elles bougent, l'association qui vient chez vous témoigner pour les sciences au féminin !

Samedi dernier, nous avons organisé une matinée Sciences au féminin pour les élèves filles de 4è.
 
 
C'est la belle association Elles bougent qui est intervenue, par l'intermédiaire de six "marraines" ingénieures. 

En amont, pendant la séance de vie de classe de cette semaine, nous avions proposé en classe entière (filles ET garçons) un quiz-débat sur les inégalités hommes-femmes, conçu par Elles bougent. Il retrace l'histoire de la mixité, des droits des femmes, de l'accès aux études et aux écoles d'ingénieures. J'ai animé ce quiz dans 4 classes, et les discussions ont toujours été riches. Nous avons notamment parlé des métiers "statistiquement masculins ou féminins" en essayant de voir s'il y avait une raison objective ou subjective (stéréotypée) de cette répartition genrée : force physique, vacances calées sur celles des enfants, salaire, importance du "care" dans le métier etc. Certains préjugés sont très ancrés, chez des élèves pourtant jeunes...

Plusieurs garçons ont exprimé une jalousie au sujet de cette matinée prévue sans eux. Pour leur faire admettre que ce temps entre filles était nécessaire, je leur ai pointé les chiffres qui montrent que les garçons n'ont globalement pas besoin d'être incités à s'orienter vers les sciences, alors que les filles, si. Je venais de terminer la lecture de Matheuses, ça aide... J'ai aussi fait un parallèle avec le handicap : installer une pente inclinée pour les personnes en fauteuil ne nuit pas aux valides. Proposer un temps-fort pour les filles sur les sciences ne nuit pas aux garçons en 4è car il n'y a pas de concurrence à envisager.

À l'issue de ces discussions, nous avons établi des questions à poser aux intervenantes (cliquer pour zoomer) :


Planning de la matinée :

  • 20 min entre adultes pour un accueil convivial
  • 15 min de présentation rapide des marraines en grand groupe
  • 3 tables rondes successives, avec une récré de 15 min après la 2nde table ronde : les élèves sont par groupe de10, et les marraines tournent entre les groupes toutes les 30 minutes
Nous avons investi les 2 CDI lycée et collège, avec trois groupes par salle ; ces lieux sont plus chaleureux que les classes et nos supers profs docs avaient installé des affiches sur des femmes scientifiques disparues ou contemporaines (celles de l'an dernier et d'autres, conçues par nos élèves) et sorti les BD, romans, et ouvrages sur les femmes scientifiques (idées ici).
 
 
Les marraines venaient d'entreprises diverses (GRDF, Safran, Equans, Demathieu Bard, Eramet ideas) et travaillaient dans des domaines variés (géologie pour la construction d'infrastructures, recherche technologie et innovation, cyber et télécom, matériaux et procédés etc.). Les échanges ont été très nourris, et les élèves ont pu poser un grand nombre de questions libres ou prédéfinies.



Ce paysage présente diverses applications / métiers possibles pour une Ingénieure-Géologue.

La matinée s'est terminée par l'annonce de 3 projets de notre collège-lycée :

- La présentation de notre classe de 2nde aéronautique qui peine à recruter des filles

- L'opération Coquelicot que nous reconduisons ce vendredi 8 mars : porter du rouge pour rendre visibles les femmes et les filles de sciences d'aujourd'hui


- Les affiches d'une expo "Femmes de sciences" réalisées par certains élèves de 4è (un binôme de garçons et une quinzaine de filles) et de lycéennes de 1ère et terminale. J'en reparlerai dans quelques jours ici 😉

Les jeunes filles semblent avoir été enthousiastes malgré la contrainte de se déplacer un samedi puisque nous avons eu plusieurs retours de familles dont celui-ci :

Nous tenons vivement à vous remercier pour l'organisation de l'intervention de grande qualité de ce samedi. Notre fille (...), même si elle n'est pas particulièrement à l'aise dans les matières scientifiques, a été impressionnée par la variété des parcours, par l'étendue des possibilités que permet une carrière scientifique et a beaucoup apprécié les échanges qui l'ont éclairée sur les sujets d'équilibre vie pro-perso, équilibre homme / femme... N'hésitez pas à relayer ces remerciements à l'association et à toutes les personnes qui ont rendue possible cette intervention !

Une belle récompense pour les heures de préparation de la matinée. Merci aux marraines d'Elles bougent, merci aux collègues Marie, Céline, Élisabeth et Laurent qui ont œuvré efficacement en amont ou le jour J, merci aux collègues et à ma cheffe d'établissement qui se sont rendues présentes samedi. Nous saurons dans quelques années si ce type de temps-fort a un impact sur l'orientation de ces jeunes filles.

🤞🏻

3 mars 2024

Matheuses. Les filles, avenir des mathématiques

J'ai reçu récemment le livre Matheuses. Les filles, avenir des mathématiques paru le 25 janvier dernier, aux éditions du CNRS. Merci au service presse du Cnrs et à ma sœur qui ont eu la même bonne idée, j'ai pu offrir un exemplaire à une collègue qui m'a bien aidée sur les projets "Sciences au féminin" en 4è cette année !


C'est un ouvrage ambitieux, qui parle de maths mais surtout des liens qu'entretiennent les filles avec les maths : les filles sont nettement moins nombreuses à investir les maths au lycée et dans le supérieur, pourquoi ?

Matheuses est écrit à six mains, par Clémence Perronnet, Olga Paris-Romaskevich et Claire Marc. 

Portrait des autrices © Claire Marc pour « Matheuses »

Clémence Perronnet est chercheuse en sociologie rattachée au Centre Max Weber, également autrice de La bosse des maths n'existe pas. Rétablir l'égalité des chances dans les matières scientifiques (éditions autrement, 2021).

Olga Paris-Romaskevich est chercheuse en mathématiques au CNRS sur les systèmes dynamiques. Elle a contribué à l'organisation du stage mathématique Les Cigales (2020-2023). Les stagiaires des Cigales sont la population étudiée et interrogée pour ce livre Matheuses. Avec Marie Lhuissier (fabuleuse conteuse mathématique) Olga est co-fondatrice de l'association Mathématiques Vagabondes. Dans ses travaux de diffusion, elle a notamment participé à l'écriture des séries Voyages au pays des maths (Arte) et La Grande Aventure des maths (Lumni). Ces séries sont extras pour les lycéens et le grand public ; j'en ai déjà projeté quelques épisodes à mes élèves de 4è sur les pavages, les probas ou Émilie du Châtelet par exemple.

Claire Marc est titulaire d’un master en océanographie et d’un master de médiation scientifique. Elle dirige son agence de communication scientifique Méduse Communication afin que chaque citoyen puisse se réapproprier les sciences. Elle est co-autrice de l’ouvrage Tout comprendre (ou presque) sur le climat, lauréat de la médaille 2023 de la médiation scientifique du CNRS. C'est elle qui a illustré et mis en images Matheuses.


Dans le livre Matheuses, on trouve quoi ?

C'est un livre de sociologie grand public et illustré, pour comprendre les inégalités en maths. Les chapitres ont tous pour titre une question permettant d'aborder un thème :

  • FAMILLE : Faut-il avoir des parents scientifiques pour réussir en maths ?
  • INTELLIGENCE : Faut-il être intelligente pour réussir en maths ?
  • INNÉ : Être forte en maths, c'est inné ou ça s'apprend ?
  • ORIENTATION : Pourquoi les filles sont-elles beaucoup plus nombreuses en médecine qu'en mathématiques ?
  • INFORMATIQUE : L'informatique rebute-t-elle les filles ?
  • CONFIANCE EN SOI : Pourquoi les filles ont-elles moins confiance en leurs capacités en maths que les garçons ?
  • ÉLITISME : Les maths sont-elles réservées aux élites ?
  • RACISME : Ne suis-je pas une mathématicienne ?
  • NON-MIXITÉ : Les actions non mixtes sont-elles un levier efficace pour l'égalité ?
  • MODÈLES : Les modèles féminin créent-ils des vocations chez les filles ?

Chaque chapitre comporte des éléments statistiques soit basés sur la population générale du lycée, soit sur les stagiaires des Cigales. On a donc des infographies très claires et pour certaines joliment illustrées. Il y a des éléments de sociologie : le constat, l'analyse, les éventuels leviers pour faire bouger les lignes. Je trouve que c'est très intéressant par la diversité des angles d'approche du sujet (rôle des parents, rôle des enseignants, rôle des camarades, rôles-modèles, racisme, inné ou acquis).

Les témoignages oraux des adolescentes sont donnés tels quels dans des bulles façon BD, ça donne un côté authentique et frais ; on a l'impression d'entendre certaines de nos élèves. Parfois en lisant j'avais de la peine pour certaines d'entre elles, envie de répondre à leurs bulles en donnant des conseils, en rassurant, en les questionnant pour aller plus loin...

C'est un livre qui se revendique féministe, mais qui n'est pas "extrémiste" dans le féminisme. En effet, il n'y a pas d'agressivité car "il ne s'agit pas de chercher un coupable, mais de trouver des solutions" pour reprendre une phrase que mon père aimait utiliser dans son boulot.

Dans le livre Matheuses, j'ai aimé :

  • L'abondance des sources et ressources en fin de chaque chapitre : on y trouve la biblio des études scientifiques et sociologiques, et une rubrique "En savoir plus..." avec podcasts, livres, films, articles de vulgarisation, sciences dans la fiction etc. Personnellement, les premières références me donnent confiance dans le sérieux de l'ouvrage : ce n'est pas subjectif, c'est établi. Ensuite, les ressources grand public me donnent envie d'aller plus loin quand je ne les connais pas déjà 😏
  • Chaque chapitre s'achève sur un problème de maths sympa : les sujets sont appétissants et variés, conçus comme des intermèdes. Ils permettent d'accéder à une démarche de recherche et certains possèdent encore des problèmes ouverts. On explore par exemple les Amidakujis chers à Alice Ernoult, la formule de Pick pour les aires sur quadrillage, la broderie hitomezashi, les polynômes commutants, les marches aléatoires etc. Des indices et des défis guident la lectrice ou le lecteur ; des solutions sont esquissées en fin d'ouvrage => Je trouverais ça chouette que le fait de posséder le livre donne accès à un PDF des problèmes pour pouvoir les utiliser en classe ou en club maths.
  • Les illustrations et la maquette : Ce livre est plus épais que ce que j'imaginais quand je voyais seulement la couverture sur les réseaux sociaux, heureusement qu'il n'y a pas que du texte... Le découpage en petits paragraphe alternant avec des graphiques, des témoignages illustrés, des portraits "tendres et réalistes", des concepts mis en images, rend la lecture beaucoup plus fluide. Cela reste quand même ambitieux comme lecture pour une jeune fille qui se poserait des questions, mais un "picorage" est possible selon ce qui l'intéresse.
  • Apprendre encore sur les inégalités de genre en sciences. Les témoignages des filles sont édifiants, et pourtant, elles sont toutes inscrites à un stage de maths, donc a priori plutôt motivées par les maths et probablement stimulées par leur entourage (famille ou enseignants). Les attitudes des enseignants sont scrutées et instructives (hommes ou femmes). Le chapitre sur la non-mixité m'a confortée dans la nécessité de promouvoir les initiatives comme les RJMI ou les speeds-meetings avec des lycéennes par les associations Animath et Femmes & Maths. Dans mon collège nous avons vécu hier une matinée Sciences au féminin pour les filles de 4è avec l'association Elles bougent... j'y reviendrai bientôt ici 😊

© Claire Marc pour « Matheuses »
© Claire Marc pour « Matheuses »

Les photos sont des extraits de pages du livre : © Claire Marc pour « Matheuses » CNRS Editions

Pour en savoir plus :

- le site compagnon du livre Matheuses 

- Une conférence donnée par C. Perronnet et C. Goldstein aura lieu à l'IHÉS le jeudi 4 avril 2024 à partir 17h30. Renseignements et inscriptions sont accessibles sur la page d'actualités de l'IHES

- Podcast : émission Zoom zoom zen du 5  février 2024 animée par Matthieu Noël, avec Clémence Perronnet comme invitée. Filles, maths et humour au programme.

23 janvier 2024

Nuit de la lecture 2024 : Cassez les codes !

Vendredi 19 janvier, notre collège a proposé aux élèves de CM2, 6è et 5è et leurs parents une soirée Nuit de la lecture. Un programme alléchant et varié permettait de se promener dans l'univers de la lecture, depuis le théâtre jusqu'aux mangas, en passant par les contes africains, les lectures en Anglais ou les codes secrets... Pour l'organisation, les enseignants ont reçu un super coup de pouce de la part des lycéens "ambassadeurs culture".

Pour ma part j'ai animé un atelier intitulé "Lire autrement : Cassez les codes !" dont le but était d'initier les élèves à la cryptographie et au braille. Comme thème de messages secrets, j'avais choisi des expressions comportant des parties du corps, en raison de la thématique nationale des Nuits de la lecture 2024 : le Corps. Les supports sont en PDF en bas de ce post ; si vous voulez une version modifiable, signalez-vous en commentaire ou sur mon mail académique (Sonia Marichal Versailles).



Sur une table, les élèves pouvaient feuilleter divers livres en rapport avec la cryptographie, notamment ceux-ci :

 PDF des énigmes (solutions à l'avant-dernière page)

9 janvier 2024

Podcast : Tête-à-tête chercheuse(s)

Nathalie AYI est chercheuse en mathématiques et maître de conférence à Paris Sorbonne Université. Elle est très active dans la diffusion des mathématiques auprès des jeunes, et notamment des jeunes filles. 

C'est l'une des femmes scientifiques dont le portrait a été fait par l'association Femmes et mathématiques pour l'exposition "Mathématiques, informatique... avec elles !". Elle nous a d'ailleurs très gentiment enregistré en 2023 une petite invitation audio à destination de nos élèves, j'en ai parlé précédemment ici.

Nathalie a été choisie pour être l'une des ambassadrices de la Maison Poincaré (musée des mathématiques) qui a ouvert le 30 septembre 2023 :

Depuis deux saisons, elle anime le podcast Tête-à-tête chercheuse(s) ; il s'agit de conversations entre elle et une chercheuse ou un chercheur en mathématique. Elle déroule le parcours d'étude de son invité(e), depuis le lycée jusqu'à son poste actuel, lui fait raconter une journée type de son boulot, lui donne carte blanche sur une rubrique, l'invite à partager des recommandations ou des coups de cœur scientifiques (site web, livre, podcast) etc.

 


À ce jour, 25 épisodes longs ou des extraits ont été diffusés. Parmi les invités, des noms qui m'étaient tout à fait inconnus et des "célébrités" (dernièrement Laure Saint-Raymond, Hugo Duminil-Copin).

Ce soir, Nathalie a lancé un "appel à témoignages" sur Twi...X concernant l'écoute de son podcast ; je le relaye ici et vous livre le mien
 
 
Pour ceux qui connaissent, écoutent et apprécient le podcast, ce petit coup de pouce sera le bienvenu pour Nathalie, et pour les autres, mon petit post sera l'occasion de faire une belle découverte.

Voici ma petite "π*R" à l'édifice :
 
Le podcast Tête-à-tête chercheuse(s) représente pour moi une parenthèse mathématique très agréable et une vraie fenêtre sur le monde de la recherche.
Je ne l'écoute pas dans l'objectif d'infléchir ma trajectoire d'enseignante déjà bien établie. C'est pour moi l'occasion d'entendre du positif sur les maths, bien loin des échos dramatiques des médias sur les résultats de la France en maths. Cela me ramène parfois une vingtaine d'années en arrière quand j'étais sur les bancs de la fac Pierre et Marie Curie...
Je découvre quelques parcours atypiques, j'entrevois la recherche en maths sous de multiples facettes riches et contemporaines.
La "carte blanche" est une rubrique à laquelle je prête une oreille particulière, car les interlocuteurs et interlocutrices de Nathalie Ayi y dévoilent régulièrement des thèmes qui me parlent (dernièrement, le syndrome de l'imposteur...). Plusieurs chercheurs et chercheuses invités s'engagent activement pour la place des femmes en sciences ; cela fait écho à mes petites actions "féminisciences" en tant que prof de collège-lycée.
Je connais souvent déjà les "recommandations" de livres, sites et podcasts en fin d'émission et j'y souscris !
Enfin, j'apprécie la bonne humeur communicative de Nathalie Ayi, et le ton accessible des conversations.
Un coup de cœur ? Probablement les épisodes avec Hugo Duminil-Copin. Quel bon médiateur et communicant pour les sciences ! Brillant et modeste, le podcast nous le dévoile comme un homme "normal" qui pourrait être le cousin scientifique sympa et drôle de la famille, ouvert et engagé pour rendre les sciences accessibles à tous et toutes... On est loin de l'image du génie hors-sol.
 
Un regret peut-être pour TaT-chercheuses : le format vraiment long (1 h à 2 h par invité(e) m'empêche d'écouter d'une traite une émission... Petit compromis perso : j'écoute parfois la partie "études / parcours" en vitesse accélérée ;-)

Et vous, vous l'écoutez pour quelles raisons, ce podcast-là ?