Article de Ouest-France de mercredi 9 janvier.
Les femmes restent sous-représentées dans les professions scientifiques, qu'il s'agisse de la recherche ou du métier d'ingénieur, en dépit du réel plaisir qu'on y trouve, selon des chercheuses.
"Il faut montrer que des femmes font ces métiers et ont du plaisir à le faire", a déclaré mardi Claudine Hermann, première femme à avoir été nommée professeur de physique à l'École polytechnique en 1992, lors d'une rencontre avec des lycéens et étudiants au Palais de la découverte à Paris.
Maintenant retraitée, elle anime plusieurs associations - Femmes et Sciences, Femmes Ingénieurs, Femmes et mathématiques - et invite les filles à "oser aller vers ces métiers".
"En France, il y a
20% de femmes en mathématiques, contre 60% en Italie, donc il doit y avoir du culturel là-dedans. Il n'y a pas de raison que le cerveau change en traversant les Alpes", relève-t-elle en cherchant à bousculer les idées reçues, y compris chez les éducateurs.
"Ca change très lentement", mais "il y a des énormités que personne n'ose plus dire", note-t-elle.
En Europe, les femmes ne représentent qu'environ
30% des chercheurs tout secteurs confondus, selon Luisa Prista, chef de l'Unité "culture scientifique et questions de genre" à la direction générale de la Recherche de la Commission européenne.
La parité est presque atteinte en Lituanie et Lettonie, mais la proportion de femmes descend à 18% aux Pays-Bas, alors qu'en France elle se situe dans la moyenne européenne, a précisé cette responsable,
ingénieur en mécanique et mère de cinq enfants.
Et pourtant, assure-t-elle, les "équipes mixtes donnent des résultats de qualité meilleure", car hommes et femmes y apportent leurs "sensibilités différentes".
La proportion de femmes parmi les chercheurs est plus importante dans les domaines où les salaires sont moins attractifs, note Mme Prista.
Plus nombreuses parmi les diplômés (environ 60% du total en Europe) que les hommes, les femmes restent très minoritaires (18%-19%) au
top niveau des carrières, regrette-t-elle, évoquant le "plafond de verre" empêchant la progression des femmes vers les postes à responsabilité.
Ce plafond invisible est aussi évoqué par Dany Escudié, directeur de recherches CNRS spécialisée en mécanique des fluides.
"
Il n'est pas facile pour une femme de s'imposer", déclare cette chercheuse qui, en début de carrière, a été parfois la seule femme parmi l'assistance d'un congrès et qui, en grimpant dans la hiérarchie, s'est retrouvée seule femme présente lors de "réunions de stratégie".
Mme Escudié qui dirige le Centre de Thermique de Lyon (CETHIL), invite les femmes à foncer, sans "se mettre à elles-mêmes des barrières".
Isabelle Terrasse, titulaire d'un doctorat de mathématiques appliquées de l'École polytechnique, qui a réussi à 35 ans à devenir cadre supérieur chez EADS, cherche à "motiver les filles dès le collège et le lycée" via l'association "Elles bougent".
Barbara Cochard, "tombée par hasard dans le
métier d'ingénieur après la licence", veut aussi faire découvrir les métiers scientifiques via cette association.
Quant à Renée Clair, agrégée de physique qui aurait voulu être chercheuse, elle continue de promouvoir, au sein de l'Unesco (Organisation des Nations unies pour l'éducation, la science et la culture) la place des femmes dans la Science via les prix L'Oréal-Unesco et des bourses.