Je n'y crois pas trop...
PARIS — Le président du groupe UMP à l'Assemblée nationale, Jean-François Copé, propose d'instaurer un "examen de passage en 6e", une idée jugée "totalement passéiste et inefficace" par les principaux syndicats enseignants, une "fausse route" pour le Parti socialiste.
L'élu qui a pour ambition de briguer l'Elysée en 2017 devait plaider mardi soir pour la création d'un "examen de passage en sixième" à la fin de la scolarité primaire, lors d'une réunion au sein de son club, Génération France.
M. Copé a proposé que cet examen "d'évaluation des connaissances des élèves" (lire, écrire et compter), soit passé "en fin de CM2".
En cas d'échec, il préconise le redoublement.
Enfin, il plaide pour "repenser" la structure de l'école primaire, en permettant au directeur, "vrai +patron+", de recruter et d'évaluer ses enseignants, tout en devenant responsable des résultats de son établissement.
Le ministre de l'Éducation, Luc Chatel, s'est prononcé pour l'évaluation des élèves "tout au long de la scolarité" se démarquant du chef de file des députés UMP, qui prône "un examen un peu sacralisé" avant l'entrée des élèves en 6e, a-t-il déclaré mardi soir avant de participer à une réunion sur l'école primaire de Génération France, le club politique de M. Copé.
Depuis 2007, plusieurs rapports soulignent que 15% des élèves arrivent au collège sans maîtriser les bases du français et du calcul, ce qui a donné lieu à une réforme du primaire à la rentrée 2008, avec de nouveaux programmes censés "recentrer" l'école "sur les fondamentaux", lorsque Xavier Darcos était ministre de l'Education.
Un examen d'entrée en sixième avait été mis en place dans les années 1930 "après le déficit d'élèves dans les années 1920 dû aux générations creuses de la Première Guerre mondiale et la décision d'ouvrir le (petit) lycée aux élèves boursiers", a rappelé le sociologue François Dubet à l'AFP.
Il s'agissait "de s'assurer d'un certain niveau". Cet examen a été aboli en 1959, au moment où était allongée la scolarité obligatoire à 16 ans, a-t-il ajouté.
Les préconisations de M. Copé ont soulevé l'ire des syndicats enseignants, interrogés par l'AFP.
"Ce sont des propositions totalement passéistes et inefficaces", a affirmé Sébastien Sihr, secrétaire général du SNUipp-FSU (premier syndicat des professeurs des écoles).
"Les objectifs de la société du XXIe siècle ne sont plus ceux des années 1950. En outre toutes les études internationales montrent que le redoublement est inefficace", a-t-il dit.
Avec 40% des élèves de 15 ans ayant redoublé au moins une fois (chiffres OCDE de 2003), l'Hexagone est le "champion des redoublements", qui sont pourtant "inefficaces et très coûteux", quand les pays nordiques, le Japon ou le Royaume-Uni ont des taux "nuls ou quasi-nuls" de redoublants, avait ainsi résumé la Cour des Comptes dans un rapport en mai.
"Derrière la proposition Copé, il y a la remise en cause du collège unique", a dénoncé Thierry Cadart (Sgen-CFDT), qui s'est dit "effaré" par un "numéro de batteur de foire".
Tous ont estimé qu'il fallait agir avant, voire dès la maternelle.
Le Snalc-Csen (traditionnellement classé à droite), s'est dit "opposé à l'examen d'entrée en sixième et au redoublement" mais a plaidé pour "une diversification des parcours en collège".
"C'est un ballon d'essai", une "gesticulation politique", une manière de "flatter une partie de l'opinion extrêmement conservatrice", a estimé François Dubet.
Pour le Parti socialiste, M. Copé a "tout faux", le vrai problème étant à ses yeux le "sous-investissement dont souffre l'école primaire en France", comme l'a souligné le rapport de la Cour des Comptes.
Copyright © 2010 AFP - Karine Perret