Info ou intox ?
En appliquant un courant électrique au cerveau, des chercheurs ont rapporté, dans le journal Current Biology [1], qu’ils pouvaient augmenter les performances mathématiques pendant plus de 6 mois, sans influencer les autres fonctions cognitives. Selon les chercheurs, les résultats pourraient conduire vers des traitements visant les 20% de la population ayant des problèmes sévères ou modérés avec les nombres (comme par exemple la dyscalculie), et pour ceux qui ont perdu cette capacité des nombres suite à une attaque ou une maladie dégénérative.
"Je ne dis pas qu’il faut que les gens aillent s’électrocuter eux-mêmes, mais nous sommes extrêmement excités par le potentiel de nos résultats" dit Roi Cohen Kadosh de l’Université d’Oxford. "Nous avions montré auparavant que nous pouvions temporairement induire une dyscalculie (avec une autre méthode de stimulation cérébrale), et il semble maintenant que nous puissions aussi être en mesure de rendre quelqu’un meilleur en maths. La stimulation électrique ne fera pas de vous un Albert Einstein, mais si nous y arrivons, cela pourrait aider certaines personnes à mieux faire face aux mathématiques."
Les chercheurs ont utilisé une méthode de stimulation du cerveau connue comme étant une stimulation électrique transcranienne directe (SETD). La SETD est une technique non invasive dans laquelle un faible courant est appliqué au cerveau continuellement dans le temps pour augmenter ou réduire l’activité des neurones. La technique a attiré l’attention ces dernières années pour son potentiel d’amélioration de différentes fonctions chez les gens avec des déficits neurologiques, par exemple chez ceux qui ont souffert d’une attaque.
Dans la nouvelle étude, les chercheurs ont appliqué la SETD au lobe pariétal, une portion du cerveau qui est crucial pour la compréhension numérique. Les participants de l’étude avaient des aptitudes mathématiques normales, mais on leur a demandé d’apprendre une série de nombres artificiels, des symboles qu’ils n’avaient jamais vus avant qu’on leur dise qu’ils représentaient des nombres, tandis qu’ils recevaient la stimulation cérébrale non invasive. Les chercheurs ont alors testé la capacité des participants à traiter automatiquement les relations entre ces nombres artificiels les uns les autres, et de les cartographier correctement dans l’espace en utilisant les méthodes de test standards pour la compétence numérique.
Les résultats des tests ont montré que la stimulation du cerveau améliorait la capacité des participants de l’étude à apprendre les nouveaux nombres, et que ces améliorations duraient 6 mois après l’entrainement.
Maintenant qu’ils savent que le traitement par stimulation électrique transcranienne directe peut améliorer le traitement des nombres chez les personnes ayant des aptitudes mathématiques normales, les chercheurs prévoient de tester son utilisation chez ceux ayant des troubles numériques sévères. Si cela fonctionne, il pourrait avoir des conséquences importantes, dit Kadosh, étant donné que les personnes avec des troubles numériques importants ne peuvent souvent pas gérer des tâches basiques comme comprendre les étiquettes des produits, ou faire la monnaie au supermarché. Une capacité médiocre avec les nombres a aussi été associée au chômage et à de faibles revenus, à la dépression, à une faible estime de soi et à d’autres problèmes, dit-il.
[1] Modulating Neuronal Activity Produces Specific and Long-Lasting Changes in Numerical Competence.Current Biology Roi Cohen Kadosh, Sonja Soskic, Teresa Iuculano, Ryota Kanai, Vincent Walsh.
Source :
Insoliscience